dimanche 1 avril 2012

1770 : Le mariage du siècle

Cette année-là, Louis-Auguste, dauphin de France, petit-fils du roi Louis XV, épousait à seize ans une archiduchesse d'Autriche âgée de quinze ans, Marie-Antoinette de Habsbourg-Lorraine, fille de l'impératrice Marie-Thérèse, reine de Bohème et de Hongrie.
Louis, d'abord duc de Berry, était devenu dauphin à la mort en 1765 de son père le dauphin dont il était le deuxième fils (l'aîné, Louis-Joseph-Xavier, duc de Bourgogne, était mort à dix ans en 1751).
Marie-Antoinette était l'avant-dernier des seize enfants et la dernière des onze filles de l'impératrice et de son époux François, lui-même empereur, ancien duc de Lorraine et de Bar, grand-duc de Toscane et petit-neveu par sa mère, Élisabeth-Charlotte d'Orléans, du roi Louis XIV.
Les deux jeunes fiancés, qui avaient donc en Louis XIII un ancêtre commun, étaient fort différents de caractère. Louis avait reçu de ses parents une éducation soignée et des principes religieux, mais ce jeune homme intelligent et consciencieux, passionné par la lecture et par la chasse, encore maladroit en public, était alors le trop bon élève du duc de La Vauguyon, qui lui inculquait une conception fénelonienne de ses futurs devoirs de roi, fondée plus sur la vertu que sur le sens de l'autorité et peu efficace pour redresser sa sensibilité excessive.
Renversement des alliances
Marie-Antoinette, pour sa part, avait grandi à la Cour de Vienne dans une assez grande liberté ; ses gouvernantes s'étaient souciées de lui apprendre le maintien, la danse, la musique, plus souvent que de nourrir son intelligence pourtant très vive. Pour la préparer à son rôle de dauphine de France et notamment pour perfectionner son français, sa mère lui avait donné un nouveau précepteur, l'abbé de Vermont, docteur en Sorbonne. À quinze ans, quelque peu primesautière, elle était toute grâce et touchait tous les coeurs.
Ce mariage marquait l'apothéose de la grande et prémonitoire politique de renversement des alliances que le conformisme idéologique des faiseurs d'opinion a si niaisement reproché à Louis XV.
Il s'était avéré au milieu du XVIIIe siècle que la vieille politique de lutte contre la maison d'Autriche n'avait plus de raison d'être, car depuis que des Bourbons régnaient en Espagne (1700), le grand danger en Europe venait de la Prusse aux ambitions démesurées. Or le roi de ce pays, Frédéric II, était devenu la coqueluche des philosophes dits des Lumières ! Louis XV avait eu le courage de braver l'opinion dès 1756, alors qu'allait commencer la Guerre de Sept ans. Avec l'aide de l'abbé de Bernis, futur cardinal, alors secrétaire d'État aux Affaires étrangères, et du duc de Choiseul, alors ambassadeur à Vienne, et aussi de la marquise de Pompadour, il avait répondu aux avances de l'impératrice qui ne pouvait être diplomatiquement isolée face aux visées prussiennes sur l'Allemagne. Bainville l'a montré clairement, il s'agissait, dans l'esprit du vieux traité de Westphalie (1648) de défendre « l'équilibre européen », ce dont on aurait dû se souvenir en 1917 !...
Les négociations en vue du mariage de Louis et Marie-Antoinette ne traînèrent pas, menées dès 1767 par le marquis de Durfort, ambassadeur de France à Vienne, avec l'aide de l'ambassadeur d'Autriche en France, le comte de Mercy-Argenteau, qui s'engagea auprès de l'impératrice à veiller sur la petite archiduchesse...
Celle-ci, arrivée le 7 mai 1770 à Strasbourg, où un pavillon sur le Rhin lui permit de changer ses vêtements, rencontra le dauphin le 13 dans la forêt de Compiègne, et le 16, tout Versailles rutilait des plus grands fastes pour le mariage célébré par l'archevêque de Reims. Les fêtes durèrent plusieurs jours à Versailles et à Paris, où, hélas, le 30 mai, la foule en liesse, s'engouffrant rue Royale, ne put éviter le drame : plus de trois cents personnes moururent piétinées. Marie-Antoinette en fut bouleversée.
Quatre ans plus tard, le 10 mai 1774, mourait Louis XV. À vingt ans Louis devenait le roi Louis XVI et, à dix-neuf ans Marie-Antoinette, reine de France, était déjà désignée par une coterie de désoeuvrés comme "l'Autrichienne"... À genoux, ils prièrent Dieu de les aider.
MICHEL FROMENTOUX L’Action Française 2000 du 3 au 16 avril 2008

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