jeudi 15 janvier 2015

Un jour, un texte ! Le soldat et sa famille par Georges Robin

« La civilisation française, héritière de la civilisation hellénique, a travaillé pendant des siècles pour former des hommes libres, c'est-à-dire pleinement responsables de leurs actes: la France refuse d'entrer dans le Paradis des Robots. »
Georges Bernanos, La France contre les robots
Cette nouvelle rubrique a pour objet de proposer des textes pour aider tout un chacun à réfléchir sur des sujets précis et si possible, d'actualité, aujourd'hui, à l'heure où le pouvoir politique incapable de gouverner le pays, déclenche une guerre tous les 6 mois, tout en coupant à l'armée française ses moyens: le soldat et sa famille (15)
« Aujourd'hui, c'est Noël, Papa est revenu ! »
Le commandant Georges Robin a été mis en prison après le putsch d'Alger dont il a été un des acteurs essentiels avec son Groupement de commandos parachutistes.
Il revient sur les conséquences familiales de son incarcération.
« Lorsque demain, privé de mes droits de citoyen, déchu du corps des officiers de France, je me présenterai devant mes enfants, je pourrai, au nom de ceux qui depuis quinze ans n'ont pas craint de tout donner pour que soit tenue et respectée la parole de la France, leur léguer, à défaut de sécurité matérielle, l'héritage d'un honneur sans compromission ».
Conclusion de sa déclaration à son procès, le 21 juin 1961, pour sa participation au putsch d'Alger.
Durant la parenthèse carcérale, nos familles payèrent le prix lourd de nos engagements. Les contraintes attachées à ma qualité d'officier avaient déjà été nombreuses. Mon mariage avait été subordonné au service de la France auquel me destinait tout naturellement l'épaulette. Ma mission était indivisible. Me suivre impliquait alors de supporter une présence aléatoire et une absence certaine.
Avec toutes les incertitudes que cela posait : c'était le retour ou la mort.
Mon épouse incarna de manière sublime cette redoutable vertu du courage. En en faisant une joie, elle devint le ciment et la condition de mes actions. Il fallait incontestablement que nos épouses aient le cœur chevillé à l'âme pour pouvoir tenir de façon aussi évidente et aussi forte. Beaucoup de nos certitudes vinrent de ces femmes, épousant avec nous toutes les formes de nos combats. Je n'ai pu être ce que je suis que par la grâce de sa proximité.
Nos proches nous furent pourtant si lointains. Que de difficultés s'attachaient à nous par le simple fait des mutations ! Celles-ci brisaient tout lien naissant d'amitié que nos enfants étaient en droit d'espérer. Ils ne pouvaient ainsi se constituer ces complicités qui rendent la vie moins lourde. Les familles de militaires sont des familles nomades. Les déménagements et les emménagements se font ; les liens, eux, se défont.
Tout ce que recouvre l'ordinaire du quotidien, ces petits plaisirs qui donnent leur saveur aux journées, la familiarité commerçante, la scolarité convenue, tout cela je les en ai privés. Au nom de mon engagement. Nous étions sereins parce que rangés derrière notre drapeau, considérant celui-ci assez ample pour nous vêtir tous ensemble dans un même geste.
Lois Spalwer http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/web.html

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